La redistribution ciblée des revenus de l’ETS 2 aux ménages qui en ont le plus besoin et l’investissement dans les infrastructures décarbonées sont deux conditions nécessaires pour rendre cette mesure plus juste socialement.
Selon une nouvelle étude de T&E, le nouveau marché carbone de l'UE (ETS 2) va générer 300 milliards d'euros [1] de revenus pour les Etats, dont une partie devra aider les citoyens européens à se libérer de la dépendance aux carburants fossiles importés. Les conditions pour une mise en œuvre juste de cette mesure sont :
une redistribution ciblée des revenus de ce marché. Pour T&E, 50 à 75 % des revenus de l'ETS 2 devront être reversés aux ménages à faibles et moyens revenus, sous la forme d'un soutien financier.
un investissement dans les infrastructures décarbonées.
En 2027, l'UE introduira un nouveau système d'échange de quotas d'émission, appelé ETS 2, qui fixera un prix du carbone sur le diesel, l'essence et les combustibles de chauffage, en plus du marché du carbone déjà existant sur les émissions industrielles. Les revenus générés alimenteront les budgets des Etats. A court terme, ce nouveau marché carbone pourrait rendre l'essence, le diesel et le gaz plus chers, et donc peser plus lourdement sur les factures d'énergie et de carburants des ménages modestes. Pour des raisons de justice sociale, il est donc crucial de neutraliser au maximum cet impact potentiel d’ETS 2.
Lorsqu'on regarde l'évolution moyenne des prix du pétrole sur 20 ans, on constate qu'ils augmentent moins vite que le reste de l'économie. Même avec un prix de l’ETS à 55 euros par tonne, les prix de l'essence resteraient inférieurs à la moyenne des 20 dernières années, en euros constants.
T&E recommande aux gouvernements de redistribuer directement, aux ménages les plus modestes, la moitié des 300 milliards d'euros de recettes perçues au titre de l'ETS 2 entre 2026 et 2032. L'autre moitié des revenus d’ETS 2 devra être investie dans des infrastructures et solutions décarbonées. Cela inclut, entre autres, des subventions pour des voitures électriques abordables, de meilleurs transports publics et des infrastructures de recharge.
Diane Strauss, directrice de T&E France, explique : « La mise en place d’ETS 2 ne doit pas être un fardeau pour les ménages dont le pouvoir d’achat est déjà impacté par le prix des carburants. A condition que les revenus de ce marché soient équitablement redistribués et que les investissements soient réalisés, il est possible de faire d’ETS 2 un levier pour décarboner nos transports et redonner du choix aux Français dans leurs déplacements».
Les mesures de soutien doivent être engagées avant 2027
L'UE a mis en place un Fonds social pour le climat (FSC), afin de s'assurer que les revenus de l'ETS 2 soient redistribués aux ménages les plus pauvres. Pour T&E, il faut aider les ménages et lancer les investissements en amont de la mise en place d’ETS 2, dès 2026, afin d’anticiper les éventuels effets sur les prix. Pour cela, la Commission européenne pourrait accorder des prêts aux États membres. Cette avance de fonds pourrait ensuite être remboursée avec une partie des recettes de l'ETS 2.
Dans le cadre de l'échange de quotas d'émission, le prix fluctue en fonction de l'offre. Le prix du carbone peut donc fluctuer considérablement. Comme ces prix ne peuvent être plafonnés au niveau national, T&E appelle à une réforme de la réserve de stabilité du marché de l'UE afin de maintenir les prix à un maximum proche de 55 euros par tonne de CO2. La France peut aussi décider de réduire partiellement ou totalement la composante carbone de la TICPE (44,6 euros par tonne de CO2) pour mieux contrôler l’augmentation des prix. Dans ce cas, T&E recommande que la France fixe aussi un prix plancher au carburant en cas de diminution soudaine du cours du baril de pétrole.
Les prix de l'ETS 2 dépendent du succès des politiques de décarbonation et de transition, notamment des normes de CO2 des véhicules. L’électrification des flottes d’entreprises au niveau français et européen est une autre mesure clé. Ces deux mesures offrent en effet un immense potentiel de réduction des émissions et permettraient donc de maintenir les prix de l'ETS 2 à un niveau bas.
Par ailleurs, T&E appelle à investir dès 2026 dans les alternatives à la voiture thermique pour mieux protéger les ménages : favoriser l’accès à la voiture électrique pour les plus modestes et développer une offre de transports en commun comme les services express routiers, lignes de covoiturage, TER et aménagements cyclables express. Ces investissements peuvent être financés par la hausse de la taxe sur les billets d’avion, la création d’une taxe sur les billets de croisière, et une taxe sur le e-commerce.
Notes aux éditeurs
[1] En assumant un prix du carbone de 55 euros/tCO2 pendant la période 2027-2032.
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